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2018
Beethoven: Septuor en mi bémol majeur, Op. 20; Strauss: Till Eulenspiegel einmal anders! par Les Solistes OSM
Étiquette: Analekta
No de catalogue: AN 2 8788
Ma contribution à cette production incroyable
Réalisateur, Ingénieur son, Mixage et Ingénieur au master
Récompenses
Gagnant
Gagnant
Projet

Source: Pochette de l'album

Un texte de France Brassard,

Sous la direction artistique d’Andrew Wan, violon solo de l’OSM, cet album met en valeur les grandes qualités musicales des musiciens de l’OSM en formation réduite : Andrew Wan au violon, Neal Gripp à l’alto, Brian Manker au violoncelle,
Ali Yazdanfar à la contrebasse, Todd Cope à la clarinette, Stéphane Lévesque
au basson et John Zirbel au cor.

Le Septuor en mi bémol majeur, op. 20, de Ludwig van Beethoven et Till Eulenspiegel einmal anders!, arrangement par Franz Hasenöhrl du poème symphonique Till Eulenspiegel, op. 28, de Richard Strauss permettent d’apprécier le mélange des timbres de trois importants groupes instrumentaux de l’orchestre : les cordes, les bois et les cuivres. Après le Septuor, où la texture musicale demeure finement ciselée grâce à la variété des timbres, on s’émerveille de l’ingéniosité dont fit preuve Hasenöhrl pour suggérer tout un orchestre avec seulement cinq instruments. Réunies, ces deux œuvres constituent un programme où prédomine une certaine légèreté – agrémentée d’une pointe d’humour.

Ludwig van Beethoven (1770-1827) compose son Septuor en mi bémol majeur, op. 20, dans la deuxième moitié de l’année 1799. Ayant quitté Bonn en novembre 1792 pour aller étudier auprès de Joseph Haydn à Vienne, il y demeure encore au moment où il écrit le Septuor, bien que ses études avec « Papa Haydn » aient pris fi n depuis 1794. C’est que Beethoven a su faire reconnaître son talent dans cette ville, où il reçoit le soutien de plusieurs aristocrates viennois, ainsi que l’explique son élève Carl Czerny : « Il a été dit et répété à l’étranger que Beethoven ne fut pas apprécié à Vienne et qu’on s’empressa de lui faire obstacle. La vérité est que, dès sa jeunesse, il fut très largement soutenu par la noblesse et bénéficia autant que n’importe quel autre jeune artiste de l’attention et du respect de la haute aristocratie ».

Conçu en six mouvements – ce qui fait en sorte qu’on le compare souvent à un divertimento ou à une sérénade –, le Septuor, op. 20, se caractérise par son inventivité mélodique et sa grande fraîcheur, laquelle s’explique en partie par le fait que tous les mouvements sont dans des tonalités majeures et que les passages en mineur se font, somme toute assez rares dans l’ensemble de l’œuvre. L’auditeur familier avec les 32 sonates pour piano reconnaîtra sans doute dans le thème du troisième mouvement, Tempo di minuetto, celui du dernier mouvement de la Sonate en sol majeur, op. 49, n° 2, composée en 1795.

Le Septuor remporte un grand succès dès sa première exécution lors d’un concert public, le 2 avril 1800, au cours duquel était également créée la Première symphonie en do majeur, op. 21. Tandis que celle-ci déroute les spectateurs, le Septuor pour violon, alto, clarinette, cor, basson, violoncelle et contrebasse, « écrit avec goût et imagination » selon la Allgemeine Musikalische Zeitung, plaît immédiatement. Il connaît par la suite une popularité dont témoigne la parution de nombreuses adaptations pour groupes instrumentaux variés, dont celle pour piano, violon ou clarinette et violoncelle, réalisée par Beethoven lui-même (Trio en mi bémol majeur, op. 38). 

C’est en 1894, peu après son mariage avec l’excentrique soprano Pauline de Ahna, que Richard Strauss (1864-1949) commence la composition du poème symphonique Till Eulenspiegels lustige Streiche (Plaisantes facéties de Till l’Espiègle), op. 28. Le sujet est à la fois historique et légendaire : Till Eulenspiegel est un personnage qui a réellement existé, en Basse-Saxe, au XIVe siècle. Après sa mort, vers 1350, ses aventures ont été relayées oralement durant plus d’un siècle avant d’être consignées par écrit. Les facéties de Till, paysan pauvre et méprisé, n’épargnent personne : le fripon s’en prend aux représentants de l’Église, aux souverains, aux universitaires… et même à ses semblables. La diversité de ses victimes augmente la complexité du personnage : ne pouvant être réduit à une simple figure d’opposition aux différentes formes d’autorité, il se fait le représentant, rebelle à tout ordre établi, d’une sorte de liberté pure.

L’inspiration puisée par Richard Strauss dans cette histoire semble s’être manifestée directement en musique, sans passer par l’intermédiaire des mots. Au chef d’orchestre Franz Wüllner, qui, chargé de diriger la création de l’oeuvre, souhaite en apprendre davantage sur la nature des « facéties » que Strauss a mises en musique, le compositeur envoie ce télégramme : « Analyse impossible pour moi. Tout esprit épuisé dans les notes ». Dès la première, le 5 novembre 1895, Till Eulenspiegel remporte un franc succès et suscite plusieurs tentatives d’interprétation de son matériau programmatique.

Ce n’est qu’un an plus tard que Strauss confie des informations à ce sujet au critique Wilhelm Mauke. Après une brève introduction, à la manière d’un « Il était une fois », apparaissent les thèmes de Till. Ceux-ci ponctueront les différents épisodes de l’œuvre, à savoir le désordre semé par le fripon dans un marché public, son déguisement en pasteur, le rejet de la demande en mariage qu’il fait à une jeune fi lle, ses sombres desseins de vengeance contre l’humanité et, finalement, son exécution publique – élément qui montre que le compositeur était peu attaché à l’histoire « originale » du personnage, puisque celui-ci, dans les faits, a été emporté par la peste.

Intitulée Till Eulenspiegel einmal anders! (Till l’Espiègle différemment, pour une fois!), l’arrangement pour violon, clarinette, basson, cor et contrebasse que propose le compositeur autrichien Franz Hasenöhrl (1885-1970) du poème symphonique de Strauss en réduit l’effectif et le temps d’exécution, qui diminue environ du tiers en raison de la suppression de répétitions ou de passages de transition. Créée en 1954, il s’agit probablement de la seule œuvre de ce compositeur qui ait été publiée.

© Florence Brassard

 

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