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2021
Nouveaux moments baroques par Luc Beausejour
Étiquette: Analekta
No de catalogue: AN 2 8919
Ma contribution à cette production incroyable
Réalisateur et Mixage
Récompenses
Gagnant
Gagnant
Projet

Au printemps 2020, la COVID-19 franchissait le seuil de nos demeures. Les concerts étant annulés, je me suis mis à songer à un second programme « baroque » au piano. Encouragé par François Mario Labbé et Julie Fournier, respectivement président et directrice générale d’Analekta, j’ai choisi du répertoire qui me plaît et qui, tout en étant d’abord destiné au clave- cin, se prête bien à l’interprétation au piano.

Parmi les œuvres pour claviers les plus connues du compositeur amstellodamois Jan Pieterszoon Sweelinck, qu’on surnommait le « faiseur d’organistes » en raison de la renommée qu’ont eue les musiciens issus de son enseignement, mentionnons ses variations Mein junges Leben hat ein End. La composition se base sur une chanson allemande qui com- mence par une gamme descendante, aisément reconnaissable au début de chacune des six variations. Si les variations 1, 2 et 6 montrent une écriture polyphonique à quatre voix, plus vocale, les variations 3, 4 et 5 bénéficient d’un traitement propre au clavier. Le texte de cette complainte commence ainsi: «Ma jeune vie a une fin, ma joie et aussi mon chagrin… »

Une bonne partie de la vie de Johann Jakob Froberger s’écoule durant la guerre de Trente Ans. L’Allemagne souffre profondément de ce conflit et voit sa population décimée. L’idée de la mort est partout présente. On cherche alors le réconfort dans la pratique religieuse et la musique. La Méditation sur ma mort future, dans la tonalité radieuse de ré majeur, offre espoir et consolation. Selon l’indication de Froberger, la pièce « se joue lentement et avec discrétion», c’est-à-dire sans trop de rigueur dans le tempo.

La Passacaglia de Johann Caspar Ferdinand Fischer est tirée de son Musicalischer Parnassus, recueil comprenant neuf suites portant chacune le nom d’une des muses de la mythologie. La suite Uranie, qui clôt l’ensemble, se termine par une grande passa- caille, la pièce la plus développée du recueil. Suivant le principe de la variation, ses 23 sec- tions de huit mesures chacune démontrent une grande maîtrise de l’écriture. Bach, d’après un témoignage de son fils Carl Philipp Emanuel, avait Fischer en haute estime et le considérait comme un des meilleurs compositeurs de son temps.

Dans le très touchant Largo du Concerto en fa mineur de Jean- Sébastien Bach, le soliste est accompagné par de délicats pizzicatos aux cordes. Je les ai enregistrés séparément de la partie de clavier, et le tout a été amalgamé par la magie de l’électronique…

Je ne me suis jamais lassé de la lumineuse Suite française en sol majeur de Bach. Cette œuvre, sans doute la plus jouée des six Suites françaises, inspire la joie de vivre. Les contrastes engendrés par la succession des danses et la grâce du discours contribuent à la rendre irrésistible dès la première écoute.

La Sinfonia [Invention] à 3 voix no 5 en mi bémol majeur, toujours de Bach, comporte deux lignes musicales en imitation jouées par la main droite tandis que la ligne de basse est confiée à la main gauche. La version qu’on trouve dans le Clavierbüchlein ne contient aucun ornement dans les deux voix supérieures, mais dans la version ultérieure de 1723, Bach a ajouté des signes d’ornementation. C’est cette magnifique version que j’ai retenue.

La Sonate en ré mineur, K. 9, appartient aux Essercizi per gravicembalo, recueil de 30 sonates de Domenico Scarlatti publiées à Londres en 1738. Dans l’avertissement, on peut lire: «Lecteur, ne t’attends pas, que tu sois dilet- tante ou professeur, à trouver dans ces compo- sitions une intention profonde, mais plutôt un ingénieux badinage de l’art pour t’exercer au jeu hardi sur le clavecin. […] Vis heureux!» Ces Sonates sont dédiées au roi Jean V de Portugal, qui avait invité le maître italien à Lisbonne pour donner des leçons de clavecin à sa fille Maria Barbara, future reine d’Espagne. La Sonate en si mineur, K. 87, d’un style vocal et d’une texture généralement à quatre voix, compte parmi les plus belles écrites par Scarlatti dans la veine mélancolique.

François Couperin coiffe très souvent ses pièces de titres évocateurs et parfois mys- térieux indiquant des portraits et des pièces de caractères. «J’ai toujours eu un objet en composant toutes ces pièces: des occasions différentes me l’ont fourni. Ainsi les titres répondent aux idées que j’ai eues : on me dispen- sera d’en rendre compte. » Les Ombres Errantes, assorties de l’indication « Languissamment », est une pièce expressive d’une rare beauté. Avec son écriture dépouillée, cette page semble le reflet d’une journée grise. La «pièce croisée» Le Tic-Toc-Choc ou Les Maillotins, toute de viva- cité, commande une exécution sur un clavecin à deux claviers car les deux mains, chacune sur le sien, se superposent et font entendre de multiples unissons. Si l’on ne dispose pas de deux claviers, la solution proposée par François Couperin est toute simple : il faut jouer la main gauche une octave plus bas…

 

Dans l’avis de son livre de pièces de clavecin, Armand-Louis Couperin, fils d’un cousin de François Couperin le Grand, affirme avoir été encouragé par ses amis à composer pour l’ins- trument à cordes pincées. Son unique recueil compte un peu plus d’une vingtaine de pièces où «tout est portrait en différents genres». Armand-Louis Couperin a peint en musique plusieurs amis musiciens, dont André Chéron dans un rondeau qui n’est pas exempt d’un certain romantisme.

Claude Balbastre mène une carrière d’orga- niste à Notre-Dame de Paris et il sera le profes- seur de clavecin de Marie-Antoinette. Sa pièce La Lugeac est une gigue à l’italienne pleine de verve. Sa marche harmonique entraînante, qu’on trouve dans la deuxième partie du morceau, ne manque pas d’étonner. Il s’agit d’un hommage à Charles-Antoine de Guérin, marquis de Lugeac.

Bonne écoute !
© Luc Beauséjour, 2021

Source: Analekta.com

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