Albums

2022
Preludes - Julia Maclaine par Julia Maclaine
Étiquette: Analekta
No de catalogue: AN28914
Ma contribution à cette production incroyable
Réalisateur, Ingénieur son et Ingénieur au master
Projet

PRELUDES

Il est enrichissant d’avoir à la fois de la musique ancienne et des œuvres contemporaines sur son lutrin. En s’imaginant que la musique ancienne est nouvelle, on se libère des traditions et on y découvre des idées actuelles et un sens renouvelé. En supposant que la nouvelle musique est vieille, une certaine révérence vient s’installer ainsi qu’une con ance envers le compositeur et un sentiment de dévotion à son égard.

Mais comment exprimer en un seul album ses racines dans la musique classique, son amour de Bach et son enthousiasme pour la musique actuelle ? Je me suis rappelé d’un concert donné à Juilliard par Bonnie Hampton : elle a joué les six préludes de Bach intercalés par une œuvre contemporaine pour violoncelle seul. Je me suis inspirée d’elle et, avec le soutien du Conseil des arts du Canada, j’ai demandé à six compositeurs canadiens d’écrire des pièces pour violoncelle en réponse aux préludes de Bach.

C’était enivrant de recevoir ces nouveaux préludes écrits par Airat Ichmouratov, Gabriel Dharmoo, Carmen Braden, Nicole Lizée, Cris Derksen et Roy Johnstone. Leurs styles sont complètement différents les uns des autres et leurs compositions couvrent tout un éventail de dé s techniques au violoncelle. Si on entend nos propres racines musicales dans la musique de Bach, alors les œuvres de ces compositeurs ont germé de ces racines et ont poussé dans toutes sortes de merveilleuses directions !

Le Praeludium pour violoncelle en sol majeur, op. 69 de Airat Ichmouratov, une pièce néo-romantique, nous offre de grandes vagues océaniques en réponse au Prélude en sol majeur de Bach. Il capture l’élément lyrique du Bach en tissant ses lignes mélodiques avec les notes aiguës de ces arpèges emblématiques, et y ajoute une belle intensité virtuose.

Gabriel Dharmoo, sur son œuvre sarasaraahat: « sarasaraahat, je les entends, fantômes vaguement ancestraux, bruissements captés au vol, balancement statique, murmures dans un vaste inconnu ». Inspiré du Prélude en ré mineur de Bach et de la musique carnatique indienne, l’œuvre de Dharmoo explore les sonorités les plus douces du violoncelle, nous faisant vivre de longs moments à l’extrême limite entre le son et le bruit, de sorte que l’éventuel relâchement sur un ré grave est d’autant plus émouvant. sarasaraahat possède une qualité mystérieuse et hypnotique qui mène naturellement vers le ton sombre et exploratoire du Prélude en ré mineur.

Carmen Braden écrit dans sa partition : « Joue cette musique comme si tu venais d’entendre la Suite pour violoncelle no 3 de Bach pour la première fois, et que tu t’assoyais maintenant pour improviser, joyeux comme un enfant. » Carmen Braden m’a d’abord donné une partition aussi dénudée qu’une partition pour violoncelle de Bach, souhaitant marier le processus d’interprétation à Bach et découvrir quelles seraient mes décisions sans avoir reçu ses conseils. Sa pièce s’émerveille des motifs et des harmonies de Bach comme un jeune enfant savoure le monde autour de lui.

Dans Prayers for RuinNicole Lizée invite le violoncelle dans un monde électronique fantastique et merveilleux, où tout en haut il chante avec éloquence, se tisse dans le mouvement et le pourchasse à toute vitesse. Elle écrit : « Les relations entre les voix entrelacées nous habitent toujours lorsqu’on songe aux préludes pour violoncelle de Bach. C’est devenu un point de départ pour cette pièce pendant que je m’aventurais dans un recueil imaginaire d’hymnes religieux et de musique lounge. Le titre fait référence à l’exploration urbaine – ou urbex – où des aventuriers explorent des ruines et des structures délabrées. Les voix dans cette œuvre sont les restes délavés et en décomposition de mélodies perdues – les fils pendants de tissus en lambeaux. »

Cris Derksen écrit : « LAND BACH est ma réponse au 5e prélude pour violoncelle seul de Bach en tant que compositrice et violoncelliste autochtone. » La formation classique de Cris Derksen et son amour des sons riches et terreux dans le prélude de Bach sont clairement dépeints dans son œuvre. Elle rend honneur à la structure du 5e prélude de Bach (introduction et fugue), tout en tissant sa voix personnelle – dramatique, sincère et douce, et implacablement rythmique – autour de celle de Bach. À un certain moment, Cris Derksen s’écarte de la section en fugue pour y insérer un splendide passage d’accords roulés en boucle qui lui sont caractéristiques.

Roy Johnstone est un violoniste traditionnel et compositeur de l’Île-du-Prince-Édouard. Il possède un formidable bras d’archet de violoneux et sa musique est le parfait partenaire de gigue pour le dansant 6e prélude de Bach. No 6 Post Bach est une sorte de medley folklorique qui se promène sans pause entre différentes sections de musique de danse. Un mouvement grave et ralenti nous offre un aperçu du monde souterrain, de l’endroit ténébreux qui a donné naissance aux motifs qui imprègnent le Bach – et le Johnstone.

Mon souhait est qu’en écoutant cet album, vous serez attiré vers cette nouvelle musique par sa connexion avec Bach, et que vous entendrez la musique de Bach différemment, comme si les compositeurs du passé et du présent sont entrés dans un grand dialogue qui traverse les années et les océans.

Audio & vidéo

Presse & critiques

Alexandre Villemaire Pan M 360

 

Conjuguer Bach au présent ★★★★

Emmanuel Bernier - La Presse